BG Emilie, la dernière traque. (+feuille descro)

L'énorme alpha, blanc comme la neige qu'il soulevait en gerbe autour de lui, dévala la pente raide comme une étoile filante traçant son chemin dans un firmament de poudreuse. A l'abri des premiers sapins, avec en tête une femelle au pelage presque aussi argenté que lui, se trouvait sa meute.

A vrai dire, cela ne faisait pas beaucoup d'individus. Il avait guidé les siens après la mort de son beau-frère et de ses deux plus forts fils quand la chasse avait commencé en Slovénie. Depuis, ils avait franchi tout le massif alpin, à travers l'Autriche, et l'Italie, et la Suisse n'était sans doutes que derrière les dernières crêtes. Mais de sa meute il était le seul à le savoir. Pour eux, ce n'était que des montagnes hostiles au mois de Février qu'aucun loup ne se hasarderait jamais à franchir, sauf acculé par la faim, ou le danger. Mais ils le suivaient sans hésiter, car le danger était derrière eux et ne les lâchait pas.
Ils avaient échappés à ce qui devaient être des trafiquants de peau, mais il doutait que ce fut si simple, pour arriver dans l'Italie cisalpine, où il avait pu assuré l'automne et se pensait en sécurité, et tomber sur des chasseurs d'une toute autre trempe, qui maintenant les pourchassaient depuis dix jours, par vagues, ne laissant pas assez tomber la pression pour donner à la meute le temps de se reposer et de se nourrir. C'était des tueurs de loups, et eux n'avait pas besoin du prétexte de leur peau, ils ne voulaient que la mort de prédateurs honnis. Ils venaient des villages, la montagne était presque autant leur monde que le monde des loups, et ils ne voulaient rien partager.
Ce dernier jour, il avait pensé que si haut et si loin, ils auraient renoncés. Mais ils s'étaient contentés d'en appeler d'autres qui avait repris la traque, frais et reposés. Ils était à leurs trousses et quand le vent soufflait bien, on pouvait sentir leur odeur. Trop proche.

- Il y en a deux, et un chien, Chaïa. Ils puent leurs maisons chaudes, ils sont reposés, et le reste de leur meute doit errer pas loin.

La femelle alpha comprit de suite, et jappa ses ordres étouffés aux trois autres cachés dans les maigres sous-bois que la neige rendaient sombres et gris. La troupe suivit le mâle en silence, les deux jeunes plus tremblants que couvait leur aînée, une femelle au pelage gris souris, adulte depuis peu qui avait croisé leur chemin il y avait peu d'années.

La traque reprenait. Et sa meute devait être à l'abri.
Dix ans auparavant, il eut eu un fusil et une poignée, qu'il serait retourné les chasser à l'affût un par un. Mais il doutait même qu'il saurait encore simplement lacer une paire de soulier, ou armer un fusil. Il y avait dix années qu'il n'était plus redevenu un homme. Qu'il ne le pouvait plus.

Il s'était nommé John Hurt. Il avait 18 ans, il était aisé, il était venu d'Angleterre comme touriste. Il se souvient que rien n'était compliqué, et puis, en Italie, et en Slovénie, il était juste un touriste riche. Cela avait un soir mal tourné, et finit devant une bande de Slovènes furieux qu'il ai un peu trop plu à une des filles du coin. Il y avait eu une lutte, et il reprit conscience, sang et entrailles autour de lui, la Rage brûlant dans le feu de ses veines. Il était Garou, et l'appel sauvage de la Lune l'avait secoué jusqu'à l'âme.
Mais plus jamais ce qu'il avait été, humain, ne lui fut accessible. Il dut apprendre à vivre avec cet interdit, et réaliser qu'au mieux, il parvenait à redevenir une singerie d'homme primitif aux allures effrayantes et repoussantes.
Peut-être qu'il y avait une autre voie, mais elle ne se montra jamais. Il du apprendre seul ce qu'il était, y compris réaliser qu'il était entré dans un monde qui n'était plus vraiment celui que sa vie d'homme lui avait montré. Ses crocs déchirèrent bien des chairs, et il fit parfois alliance avec de rares semblables, et même leur chair, il apprit à la connaître pour mériter le droit de vivre.
Il fit ce qui semblait le plus simple, et devint le loup qu'il était condamné à être.

Le monde des loups était simple, et beau, et il connaissait assez le monde des hommes pour en protéger une meute, qu'il se trouva, avec Chaïa, qu'il avait libéré d'un zoo, puis avec d'autres, défiant des alphas, hurlant la gloire simple de son nom à rester vivant et fier, et même dans les caerns perdus, on entendit parler de lui. Il épousa la vie des loups, et la préféra à celle de la voie des guerriers garous. A sa manière, mener une meute était servir un peu la cause de l'appel de Gaïa et la protéger. Que cette idée fut un leurre, ou pas, elle était un choix raisonnable à son âme.

Tandis qu'il courrait, menant ce qui restait de sa meute toujours plus loin, plus haut, dans les montagnes, il maudit non ce qu'il était, mais le regard impuissant qui l'avait mené à voir mourir loups et garous dans dix années d'errance, avec sur ses épaules le rôle absolu de les diriger, liu, né guide parmi tout les enfants de Gaïa dont les hommes étaient les derniers des plus vils rebuts. Il n'avait plus qu'eux, et plus que ce rôle à tenir, et le souvenir de la chaleur de Chaïa et de ses enfants quand ils dormaient tous paisiblement ensembles lui fit mal.

La lune déchira les nuages lourds, perçant la nuit de son aura argentée. Elle était immense, et drapait le ciel et les sapins de son linceul blanc.

Ce soir, la fin arriverait, il le savait.

La meute courrait, Chaïa avait peur, Tanis aussi, et ses deux enfants, Yser, et Ayani étaient épuisés. Et dans le silence affreux que la neige fait peser sur le monde quand elle y accroche son étau blanc, les chiens, les chiens qu'il haïssait plus que tout, aboyaient frénétiquement pour signifier aux hommes qu'ils sentaient bien la trace de leurs anciens frères qu'on les avait dressé à trahir.

Le col était à quelques pas, mais les hommes y étaient arrivés avant. La bise se levait, gelant tout autour d'elle comme si elle eut voulu emprisonner dans la glace ce qui était son monde, celui de son hiver. Et dans le froid, la neige devenait dure et craquait sinistrement à chaque pas.
Ils étaient trop près , et les chiens traçaient la piste pour les hommes, frénétiques de haine apprise. Ils avaient devinés où les loups voulaient fuir, et avaient devancé leur fuite, coupant presque le col. Ils devaient être une dizaine, avec leurs chiens et John comprit qu'ils n'avaient aucune chance.

- Jon! Nous allons tous mourir ici, et ils arracheront nos peaux!

L'alpha s'arréta, et se tourna vers les bois d'où jaillissaient les chasseurs, implacables, comme des ombres funestes de marionnettes issus des pires cauchemars des hommes.

- Non. Nous n'allons pas mourir ici. Court, ma femelle, court, et guide nos enfants. Par Gaïa, je vais leur donner un dernier combat que je graverai tant dans ces montagnes que je les ferai gémir de peur, à tout jamais!

- Ne fait pas ça!

Le loup regarda sa femelle, qui avait partagé sa vie des années durant, et un instant, il regretta que les loups ne puissent pleurer, tant il eut aimé lui offrir une larme en cadeau, et y laisser s'y noyer sa propre vie, pour son dernier instant.

- Mon sang survit dans la chair que nous avons enfanté et élevé. Garde-les en vie, et je ne mourrai jamais.

Et John, l'homme devenu loup, se jeta à la face des chasseurs et de leurs chiens, déchirant la neige gelée à en défoncer les congères qui lui faisaient barrage. Il n'y eu pas de témoin parmi les loups pour ce combat, mais les hommes parlèrent longtemps du loup qu'ils furent tous sûrs de toucher, et qui égorgea quatre chiens, et tua Pepe, le vieux cantonnier de Recche, avant de disparaître, avalé par une horreur cachée dans les bois.
Et cette horreur qui, diront-ils encore des années après autour d'un verre les soirs tristes dans le bar-tabac, a attrapé ce loup qui les avait défié, ils ne purent jamais dire ce qu'elle avait été. Mais dans leurs yeux, il y eu parfois de la peur. Celle de se souvenir.

Chaïa fuit avec Tanis et ses deux enfants, mais les chasseurs n'en avaient pas fini. Les loups ne peuvent savoir que les hommes n'ont besoin que de peu de choses pour se parler de très loin. Ils se relayèrent et de coup de fil en talkie-walkie, traquèrent Chaïa et sa meute dans toutes les alpes. Yser ne se leva pas un matin glacé pour reprendre la route, vaincu par l'hiver et la faim. Tanis fut tuée par des balles qui ravagèrent son corps maigre quand elle s'attaqua à un troupeau à l'étable, et sa carcasse fut exposée, et montrée dans les journaux.

Et Ayani finit seule, quand les chasseurs retrouvèrent la piste de ce qui n'était plus même une meute, nourrie par une haine assurée et renforcée à coup de bravades de bistrot, et de vins douteux. Chaïa marcha sur plus d'un jour, le ventre percé de deux balles de carabine, avant d'abandonner, aux portes du Printemps et des premiers jours bleus et clairs, si loin de tout qu'elle avait erré sans savoir où ses pattes l'avaient conduite.
Tandis que sa vie coulait par deux trous rouges, et que le sang emplissait ses poumons, elle trouva juste la force d'ordonner à Ayani de vivre...

- Devient fière et forte comme le fut ton père. Tu es la dernière, et son sang coule dans ta chair. Trouve une meute, et devient pour elle ce qu'il a été pour ceux qui sont venus avant toi et qui reposent. Vit pour qu'il vive, tant que tu te souviendra, que tu ne cessera de l'aimer, et que tu sera ce qu'il fut, il continuera à hurler au sommets des montagnes pour que tous se rappellent qu'il a été, et qu'il doit être à jamais! Vit, maintenant!

Ayani avait dix-huit mois. Elle erra seule, jusqu'à ce que le Printemps cède sa place à l'été. Elle apprit la victoire merveilleuse de trouver une charogne pour se nourrir un peu, le bonheur à en pleurer de pouvoir croquer un mulot, ou dévorer un serpent, et survivre, de repas en repas, et la douleur extrême de la solitude quand nul ne vient se réchauffer à vous et partager sa propre chaleur à la votre.

La survie est une amante atroce et sans âme, qui dicte qui vivra, et qui mourra. Son seul code est la survie, et la force que l'on peut y mettre. Ayani eut cette force, nul ne saurait dire pourquoi. Cela ne l'endurcit pas, ni ne la rendit plus grande, ou plus solitaire. La survie n'immunise personne à la douleur, aux frustrations ou aux regrets. Elle ne se préoccupe que de permettre à un corps de trouver les forces et le carburant nécessaire à voir passer la journée, et supporter la journée à venir. La jeune louve ne fut plus que l'ombre d'un loup, un charognard hagard, qui un soir, vaincue, s'approcha d'une cité des hommes...

Émilie Ayani Lune Blanche
Âge: 13 ans environ.
Taille: 161 cm.
Poids: 41 kg.
Cheveux: Blonds cendrés
Yeux: Bleus ciel
Signes particuliers: Aucuns

Émilie est une garou du clan Croc d'Argent, née des loups. Elle est la descendante d'un ancien héros Croc-d'Argent, la première Lupus de sa lignée, et par voie de conséquence peut-être la première à pouvoir briser la malédiction qui pèse sur ses ancêtres depuis 700 ans.

Historique
Émilie est une jeune louve, née quelque part au nord de la Slovénie. Sa meute, menacée par des chasseurs de peau, guidée par son père, John, lui-même victime de la malédiction, a migré vers le nord de l'Italie, et c'est là que le petit groupe de loups a été exterminé par une chasse qui a mené Émilie à fuir pour survivre, tandis que ses parents et sa famille tombaient sous les balles des chasseurs transalpins. Elle a erré pendant plusieurs mois, finissant émaciée et affamée, âgée d'à peine 18-20 mois, peu apte à chasser, ni à la vie d'une louve solitaire, avant, de faim et de détresse, de s'approcher des villes pour trouver de quoi manger.

Description
Émilie est de petite taille, et mince et en fait assez fragile, et émaciée. Elle a été mal nourrie des mois durant, et son développement en a été altéré, lui laissant un air enfantin d'adolescente à peine formée. De type slave, elle a la peau claire, de grands yeux bleus et des cheveux blonds cendrés ébouriffés, comme une épaisse crinière. Sous forme de louve, elle a le poil blanc argenté, et retrouve lentement sa noblesse de Croc d'Argent, son ascendance étant encore plus marquée sous forme Crinos.

Habillement
Émilie a un peu de mal avec les tenues humaines, mais se laisse assez volontiers faire et habiller par les humains, surtout par Lucile, pour qui elle a une confiance grandissante. Elle va quand même préférer avoir les jambes nues, et trouve désagréable les tenues moulantes ou cintrées, bien qu'elle aime se voir dans le tailleur à jupe plissée offert par Kenshin.

Comportement
Émilie est une louve qui ne peut en redevenir une, ne pouvant aller plus loin que la forme Hispo. Et elle en souffre, Peu depuis sa première métamorphose mais cela ne fera que la peser. Elle ne peut revenir vers les loups, ni vers la forêt, piégée à devoir vivre dans le monde des hommes. Elle s'y accoutume assez bien, faisant preuve de certains talent innés étonnants, comme le don de savoir d'instinct lire, et écrire. Mais elle a passé une grande partie de sa vie seule, et avec comme seul moyen de survie la fuite et la dissimulation. Elle est assez peu courageuse, et à vrai dire, préfère se cacher que se battre en règle général, sauf quand elle est acculée, ou que la vie d'une personne chère est en jeu. Elle montrera un vrai courage, mais il restera toujours rare. Elle se réfugie vers les autres, et respectant d'instinct l'esprit de meute, elle se soumets à priori sans discuter devant les alphas, se considérant comme un louveteau. C'est devant le Monde des Esprits qu'elle fait preuve d'initiative et de noblesse, n'étant pas choqué par ces confrontations, ou son aspect anormal, et se sentant elle-même dans le Monde des Esprits bien plus qu'ailleurs.

Personnalité
Émilie mettra du temps à marcher dans les pas de son père, et ne le fera que poussée par les événements. Elle possède la noblesse de sa lignée et de son père, mais elle est encore une enfant, et mettra du temps à se comporter autrement que comme tel. Cependant, les mots de sa mère mourante ne disparaîtront pas de son esprit: « trouve une meute, et devient pour elle ce que ton père a été pour ceux qui sont venus avant toi et qui reposent. » Elle finira par essayer de comprendre son héritage, qui est de protéger et guider une meute. Mais dans l'immédiat, la meute qu'elle trouvera sera sa seule famille, et sa situation particulière, celle d'une louve qui doit apprendre à vivre parmi les hommes, c'est à dire tout réapprendre, fera pour longtemps d'elle un être fragile et dépendant des autres.