[RP] Uhndjaks

Le "couple" déambulait dans les couloirs du Lady Caraway sous les regards intrigués et méfiants des passagers. Une jeune femme à l'air un peu naïf qui s'émerveillait de tout ce qu'elle voyait était encore passable, voir amusant. L'inquiétant personnage qui l'accompagnait nettement moins. Plusieurs mains se rapprochèrent de leur ceinture et des regards mauvais se posèrent sur le visage anguleux de l'Ukari.

La fermeté avec laquelle Sallia demanda une table en arrivant au restaurant coupa court à toute protestation qu'aurait pu émettre le serveur, et on les mena à une table fort bien préparée, le restaurant lui-même reprenant orné de riches gravures et autres argenteries.

C'est... intéressant comme endroit. dit-elle en s'installant, prenant garde à ne pas froisser sa robe, sobre, d'un marron sombre contrastant avec sa chevelure rousse et sa peau clair, celle-ci apparaissant ça et là à des endroits stratégiques, mais relativement sages.

L'Ukar regardait avec intérêt est une certaine bienveillance l'humaine devant lui. Lui que tout le monde considérait comme un démon ou un assassin (bien qu'en cela les gens n'aient pas tord) appréciait la compagnie de la jeune femme. En de rares instants, elle lui faisait oublier sa condition de hors la loi et d'étranger qu'on regardait avec appréhension. Pourtant, encore et toujours, quelque chose lui rappelait qu'il allait devoir honorer son contrat. "Le sang n'est pas sale. Se sont les gens qui le sont..." avait-il l'habitude de dire. Mais elle... Elle n'avait rien de mauvais, pas une once de méchanceté semblait couler en elle, et le jour où il devrait se débarrasser d'elle, ce jour là, il aurait les mains réellement sales. Qu'est-ce qui le différencierait d'un assassin d'un simple meurtrier alors ?

Tiré de ses pensées par la voix de sa compagne, il répondit avec quelques instants d'hésitation :

- En effet, je n'ai pas été habitué à tant de luxe et tant de belles choses. Vous en revanche, je suppose que ce n'est pas la première fois.

Sallia lança un regard alentours, détaillant les lieux, s'arrêtant parfois sur les mimiques un peu surfaites des clients habituels.

Houla... Habituée, ce serait beaucoup dire... Il m'arrive de défendre les intérêts de gens comme on en voit plein ici, mais en général, leur seul intérêt est qu'ils ont des moyens... Je sauve simplement les apparences.

Sallia lança un sourire sincère à l'Ukari.

Je dois quand même avouer que fréquenter trop souvent ce genre de personne a tendance à m'irriter à force... Mais bon... Toujours moins que les sermonts orthodoxes sur la technologie et leur menaces d'excommunion... Mais on ne va pas cracher dans la soupe. Mes supérieurs m'ont offert ce voyage, autant en profiter !

Sur ces mots, un autre sourire ravi, presque enfantin, se dessina sur ses lèvres alors qu'elle se redressait légèrement, levant le verre que le serveur venait de remplir quelques instants plus tôt, d'un liquide violacé aux senteurs fruitées.

A la votre !

L'Ukar leva son verre de concert, lançant un sourire amical à l'humaine tout en jetant de discrets coup d'oeil autour d'eux, observant les réactions des autres clients. "Comment une humaine pouvait-elle risquer sa réputation et s'attirer l'antipathie de ses pairs pour un simple Ukar ? Décidément, elle n'avait rien à voir avec tous ces individus dénués de tout sens critique, suivant le courant placidement..."

- Mais dites-moi, -finit-il par ajouter- n'avez-vous pas peur que certaines réactions, quand au fait que nous nous côtoyions de manière régulière, ne finissent par entacher votre réputation ?

Sallia regarda autours d'elle les gens qui dardaient sur eux des regards pleins de sous-entendus.

Evidemment, on pourrait imaginer plein de choses sur votre présence à mes côtés... Qui sait... L'élimination de quelques uns d'entre eux, voir un complot intergalactique pour soutenir les révoltes sur Kordeth (ndmj : planète des Ukaris)...

Elle haussa les épaules, buvant une gorgée de cette liqueur aux goût sucré et sirupeux.

Mais qu'importe de toute façon... Je travaille plus souvent avec l'Empire qu'avec les Maisons Nobles... Et ce n'est pas la Ligue qui va me reprocher votre présence. Elle recrute souvent des Ukaris... Et pas toujours pour les boulots les plus propres...

Uhndjaks regarda un instant la jeune femme, l'air songeur et finit par demander sur un ton hésitant :

- Mais vous ne vous êtes jamais dit, aux vues de la réputation de mon peuple, que j'étais peut-être là pour vous ? La plupart des personnes m'aurait tout de suite soupçonné d'avoir un contrat sur leur tête. Mais pas vous... Pourquoi ?

L'Ukar but une grande gorgée avant de reposer son verre sur la table et de plonger ses yeux dans ceux de son hôte.

Vous me croiriez sans doute folle si je vous avais répondu que je n'y aurai pas songé un seul instant. Mais s'il fallait prendre les choses d'un côté purement pratique, connaissant la mentalité des gens à l'égard de ceux de votre peuple, ne pensez vous pas que vous seriez le premier accusé si on me retrouvait morte ?

Elle lui adressa un petit sourire malicieux.

Et puis, je passe mon temps à devoir me méfier de tout le monde quand je suis en affaire, et j'aime à croire que tous les préjugés ne sont pas toujours vrais. Si tout le monde me prenait pour une Face Grise typique, je n'aurai pas beaucoup d'amis j'imagine.

Après avoir bu une nouvelle gorgée, elle releva la tête vers l'Ukari.

Et il faut bien que je vous avoue une chose... Je sais que votre présence à mes côtés me garantit aussi une certaine sécurité... Les humains savent de quoi votre peuple est capable, et cela en refroidis plus d'un. J'espère que vous n'en prendrez pas offense que je me... "serve" un petit peu de vous... Car votre compagnie m'est vraiment agréable.

- Je ne vois pas comment je pourrais être offensé. C'est un échange réciproquement profitable. J'ai la chance de pouvoir converser avec vous, d'être en charmante compagnie. Si ma présence peut, en plus, vous apporter quelques moment de quiétude, je n'en suis que plus ravi.

L'Ukari afficha un sourire charmant pour conclure sa phrase avant de reprendre sur un ton toujours léger :

- Mais dites-moi, que faites vous exactement ici ? A moins que cela ne soit totalement confidentiel...

Vous devriez faire attention, je risquerais d'y prendre goût. Et vous feriez trembler mes adversaires avant même que je n'aie à plaider.

Son air était presque sérieux sur ces paroles, avant qu'elle n'affiche un nouveau sourire amusé.

Le serveur approcha avec les menus, qu'il leur tendit.

Voyons cela ! lança-t-elle avant d'ouvrir le feuillet relié avec de belles couvertures en cuir gravé.

Tout en feuilletant la carte, elle répondit à l'Ukari, pas du tout déconcentrée par la lecture du menu.

En fait, on m'a demandé de venir sur ce navire pour régler un petit litige sans grande importance entre deux locataires du Lady Caraway. Rien de particulièrement passionnant... On va surtout dire que cela me fait quelques vacances. Et vous ? Vous rentrez sur votre monde ? (ndmj : Kordeth est à 4 sauts du Lady Caraway en ligne droite)

- Mon monde... Etrange comme depuis un certain temps cette expression dissone à mon oreille. En fait non, pas dans l'immédiat. Un jour peut-être. J'ai encore trop de fantômes qui me hantent là-bas. Mais qui sait...

L'Ur-Ukar avait lancé ces phrases sans visiblement y prêter attention, comme si, l'espace d'un instant, il avait baissé sa garde. Jetant un coup d'oeil distrait à la carte il parcourait les lignes sans grande conviction et avec un manque de culture flagrant quant à la grande gastronomie. Tout en continuant de parcourir le menu du regard il questionna une nouvelle fois l'humaine.

- Y a-t-il quelque chose que vous puissiez me conseiller sur cette carte ?

Eh bien.... Sallia regardait la carte en long, en large et en diagonal. A vrai dire, c'est toujours le problème... Il y a des noms incroyables sur ces cartes, au point qu'on ne sait même pas ce qu'on recevra au final... Mais... Les plats Teyriens sont, parait-il, particulièrement rafinés...

Elle continua de tourner la carte dans tous les sens. Celle-ci présentait de multiples spécialités des différents mondes les plus civilisés. Chacun de ces mets semblait assaisonné de diverses épices exotiques, dont certaines réputées très coûteuses... Et cela se répercutait sur le surplus de prix, jusqu'à 50 fénix pour un plat !

Vous avez des ennuis parmi les vôtres ? Vous dites ne pas pouvoir retourner chez vous...

- Des ennuis... pas vraiment. Disons que j'ai un passé un peu tumultueux parmi les miens. Certains pensent que j'y ai un rôle à tenir, mais j'ai délaissé celui-ci il y a quelques années au profit d'un développement plus... personnel. Mon retour risquerait d'attiser une nouvelle fois les passions de certains de mes pairs. Chose que je pense, pour l'instant, peu profitable à mon peuple. Et vous savez ce que l'on dit : "On est chez soit qu'à l'endroit où l'on se sent bien." et pour l'heure cet endroit est ici.

L'Ur-ukar avait parlé avec une infinie nostalgie toujours en fixant la jeune femme, ne la quittant pas du regard une seule seconde. Il avait délaissé sa carte, posée à présent sur la table et, pendant une seconde sembla vouloir ajouter quelque chose, mais s'interrompit changeant rapidement de conversation.

- Les plats Teyrien sont raffinés disiez-vous ? Que me conseilleriez-vous ?

Eh bien... moi... je vais me laisser tenter par une de ces terrines !

Elle montra à l'Ukari la page du menu sur lequel figurait une demi-douzaine de terrines différentes, aux noms tous plus exotiques les uns que les autres, avec des rallonges dont le kilométrage semblait définir la valeur qualitative du plat, et certainement, inversément proportionnelle à la quantité sur l'assiette.

Au hasard... Allez hop ! Celle la !

Elle désigna le plat à l'Ukari. D'après le descriptif, une terrine de gibier agrémenté de salades et de quelques champignons prétenduement rares sur Teyr.

- Et bien ce sera deux dans ce cas ! Et pour accompagner ce plat... exotique... ? Du vin ?

L'Ur-Ukar semblait se prêtait au jeu avec une certaine délectation.

Du vin ! Biensur ! Cela tombait sous le sens voyons !

La jeune femme arborait un large sourire, teinté d'une très légère touche de rouge à lèvres, accessoire très à la mode sous la seconde république, mais qui n'avait jamais perdu de son attrait.

De toute facon, c'est sur la note de mes employeurs !

Elle fit appeler le serveur, lançant la commande après lui avoir demandé conseil quant au vin adéquat pour ce type de plat, originaire d'après les dires de celui-ci, d'une petite vallée viticole perdue au milieu des montagnes.

Bon... nous allons avoir du temps à tuer sur ce navire... Des idées ? J'ai entendu dire qu'il y avait une réception dans deux jours dans la grande salle, pour les nouveaux voyageurs.

- Et bien si ma compagnie ne vous est pas encore insupportable, et si ma présence ne risque en rien de compliquer vos relations avec vos pairs, ce serait avec grand plaisir que je me joindrai à vous.

L'Ur-Ukar jeta un regard amusé en direction de la jeune femme avant de reprendre.

- Mais dites-moi, vos employeurs ne risquent-ils pas d'être quelque peu contrarié en voyant des notes de frais concernant deux personnes ?

La jeune femme esquisse un léger sourire en regardant l'Ukari.

Eh bien... On m'a donné carte blanche pour régler ce petit pépin. Alors... Du coup...

Elle prend un air presque solennel.

Je pense que cette mission nécessite protection, alors je fais de vous mon garde du corps le temps de cette périlleuse négociation ! Sans oublier évidemment, qu'à partir de là... Vous n'avez d'autre choix que de m'accompagner à cette soirée pour veiller à ma sécurité.

Le toisant un instant du regard, elle finit par se détendre et lui lance un petit sourire malicieux.

Alors... Vous acceptez.... Ou vous épluchez les patates jusqu'à destination ?

- Bien que j'adore les travaux manuels et que j'avoue avoir un faible très prononcé pour les féculents, je pense que je vais faire l'impasse sur la corvée de patates. Il me sera d'autant plus facile de veiller sur vous si j'ai les mains libres.

Uhndjaks lui lance alors un petit regard amusé suivi d'un léger sourire.

- Mais Madame, puisque je suis dès à présent votre garde du corps attitré, pourrais-je savoir exactement quelle menace plane sur vous afin de pouvoir prévenir tout complot visant votre sécurité ?

"On tue beaucoup plus facilement quelqu'un qui vous méprise, qui voit en vous le réel prédateur que vous êtes. Mais lorsque la chassée demande protection auprès même de la personne qui est sensée lui donner la mort, qu'elle ne voit pas le prédateur sous des traits qu'elle doit considérer comme monstrueux, mais bel et bien une personne à part entière avec la quelle il est possible de passer du bon temps. Lorsque cette cible vous prouve que l'humanité toute entière n'est pas née d'une même engeance méprisant les vôtres, il est alors beaucoup plus difficile de se souvenir pourquoi vous avez choisi cette voie. A chaque seconde que vous passez avec celle que vous commencer à considérer comme la meilleure amie que vous n'ayez jamais eue, une lueur semble grandir dans l'obscurité de votre vie, vous rappelant que l'espoir d'une entente entre vos races n'est pas tout à fait mort. Serez-vous l'architecte d'une nouvelle aire, ou simplement l'ouvrier posant une pierre de plus à l'édifice déjà colossale de la xénophobie ?" Tout en écoutant la jeune femme, l'Ur-Ukar soliloquait intérieurement, prenant peu à peu conscience de la difficulté de la tâche qui lui était dévolue.

Sallia, lança un regard distrait autours d'elle, même s'il était possible de se rendre compte qu'elle s'assurait discrètement que personne ne s'intéresse de trop près à leur table. Puis elle se pencha légèrement en avant, posant les coudes sur la table et son menton dans ses paumes, fixant l'Ukari avec un sourire destiné à tromper les spectateurs sur le sérieux de la conversation.

A dire vrai, il y a quelques remous actuellement sur le Lady Caraway. Visiblement, l'Orthodoxie commence à trouver cet endroit vraiment trop... politiquement incorrect... D'après ce qu'on en sait, l'Eglise voudrait remplacer leur représentant actuel, le Père Stephano di Corlia, qu'ils trouvent trop laxiste. Mais il a le soutient de la Ligue, qui refuse d'accepter un remplaçant.

Elle marqua une courte pause, portant un toast en direction de l'Ukari, avant de boire une gorgée de vin.

Mais il semblerait que di Corlia ne soit pas tout lumineux comme l'Eglise l'aimerait. Et il ne serait pas étonnant que l'Orthodoxie profite de ça pour le vider, et placer quelqu'un de plus "adéquat" à sa place. Et la Ligue m'a demandé de venir enquêter sur lui sous le couvert d'une autre affaire de moindre importance, pour voir ce que nous pourrions faire pour contrer l'Eglise...

Elle se recula avec un sourire.

Personne à bord n'aimerait d'un évêque trop conservateur à la tête du culte sur le Lady Caraway...