à l'auberge

Yùna avait dormi toute la journée. comme une tombe. Épuisée.
Elle s’était levée au crépuscule, était sortie faire ses exercices « matinaux », observer un instant le ciel, les étoiles qui s’allumaient. Maintenant elle est attablée devant un solide repas avant de reprendre la route, et laisse voguer ses pensées.
Elle se sent soulagée d’avoir survécu aux événements qui venaient de se dérouler, et dont elle avait perdu le contrôle. Sa vie et celle des autres avaient totalement dépendu, pendant quelques instants, de la politicienne tranchante qui appliquait une tactique rhétorique se rapportant sur un champ de bataille à charger seul en hurlant pour espérer faire peur. Ou une bête acculée. Et, comme sur les champs de bataille, il arrive que ça marche. Heureusement.
Elle se sent soulagée de ne plus avoir ce livre. Pas pour le risque qu’il représente, mais bien pour la responsabilité qu’il représente.
Dans les rues de griff lors de ses premières années de femme adulte, elle avait décidé de devenir combattante pour se couvrir de gloire, accomplir toutes sortes d’actes héroïques. La quinzaine d’années suivantes et toutes les difficultés rencontrées pour obtenir le statut de citoyenne avaient complètement broyé toute forme d’idéologie noble, laissant place à une quantification froide des actes accomplis sur l’échelle rigide de l’argent. Même par la suite, en rejoignant la compagnie, hormis l’aspect pécuniaire, son seul moteur était l’expérience à en retirer, les informations et avantages à gagner, et ses intérêts personnels, qui se sont mis à englober également ceux des autres membres de la compagnie. Sûr qu’elle n’a pas raté les occasions pour frimer, mais toujours des risques calculés. Calculés pour sa vie et ce qui va avec. Et lorsque la gloire est arrivée, ça l’a rendue encore plus cynique, parce qu’elle connaissait les secrets dégueulasses qui créaient les problèmes que la compagnie résolvait.
Et là, avec cette histoire de livre, les limites de son égoïsme avaient été atteintes. Des milliers de vies. Elle avait été forcée d’avancer à découvert, de jouer sa vie pratiquement à pile ou face, pour sauver des gens dont elle se foutait. Et ils avaient échoué. Heureusement, ils avaient survécu. Et n’avaient plus cette énorme charge qui les condamnait à vivre pour kor jusqu’à la fin de leurs jours. Maintenant, comme avant, elle pouvait se retirer de la course à tout moment.
Elle s’étire sur sa chaise, respire l’air de la nuit qui a le goût de sa liberté regagnée, une lueur paisible dansant au fond des yeux.

Cette fois-ci, ce n'était pas passé loin... Elle avait bien failli tous les tuer... Devant le Dragon de la Connaissance, cette vieille mégère, elle avait voulu appuyer les faits d'armes de sa compagnie pour s'assurer qu'Ozyr tiendrait parole, en glissant dans son récit l'apparition des Historiens. Mais, poussée sur le devant de la scène, nerveuse de ce qui se jouait à ce moment là, elle avait paniqué, pour mieux s'emmêler les pinceaux. Une erreur qui aurait dû leur coûter la vie... A tous...

Sans l'intervention d'Amila... Même si la première impression que lui avait fait la diplomate était plutôt négative, il fallait avouer qu'elle avait fait preuve d'un talent de négociatrice hors du commun... Tout ce qu'elle-même avait lamentablement échoué.

Elle observait ses compagnons en silence... Elle ferma les yeux un instant, songeuse. Elle ne devait pas les décevoir... Vivre... Survivre... Mais pour cela, elle devait apprendre de ses erreurs, et en tirer profit... Que pouvaient bien penser la Compagnie... Que dévoilerait N'Kar, visiblement aussi perdue qu'eux...

Elle rouvrit les yeux, toujours en silence, avant de les baisser sur son verre, posé sur la table.

Osric qui d'habitude ne perdait jamais une occasion de s'entrainait et se levait aux aurores pour pouvoir pratiquer tranquillement, se leva en début d'après-midi. Les derniers jours avaient été riche en rebondissement et la confrontation avec Ozyr lui avait laissé un goût amer en bouche. Lui qui avait toujours servi fidèlement les dragons avait commis des entorses aux règles draconiques et même pire, défié un grand dragon. Comment avait-il pu en arriver là ? Il se remémorait les événements qui avait conduit ses pas ici dans cette auberge.

La compagnie était un assemblage de personnages si hétéroclites que l'on pouvait se demander comment nous pouvions rester soudé. Et pourtant il semblait qu'un idéal commun nous lié. Un idéal qui n'avait que faire des clivages entre draconistes, fatalistes et humaniste. Bien qu'il ne compris ni les fatalistes ni les humanistes Osric savait que chaque vie était précieuse et que l'on n'avait pas le droit de tuer des innocents au nom d'une idéologie quand bien même cela fut pour la plus grande gloire des dragons.

Osric sortit profiter de l'air du soir. Il mit les mains dans ses poches et en sortit une petit pipe ainsi qu'une blague à tabac. En bourrant sa pipe il repensait au comportement de la maitresse des océans face à Amila. Décidément, certains dragons étaient bien plus humain qu'il n'y paraissait au premier abord. Heureusement d'autres avait un comportement bien plus digne de ce que l'on pouvait attendre d'un seigneur dragon. Osric interrompit un instant ces réflexions. Il claqua des doigts et soudain de la fumée se mit à monter de la pipe et une légère odeur de de tabac se répandit dans l'air frais du soir. Il pris quelques bouffées et se rappela alors les paroles rassurantes de Nenya, cela lui mettait du baume au cœur. Il resta quelques instant dehors à fumer sa pipe en méditant sur les paroles du grand dragon puis retourna alors dans l'auberge rasséréné et empli d'une certitude, il se battrait pour un monde dans lequel les humains et les dragons pourraient vivre en bonne entente.

Il commanda un peu de cidre au comptoir puis vint s'asseoir près d'Aelyn et Yuna en leur adressant un petit sourire d'encouragement. Puis tenta de lancer une conversation pour briser le silence qui régnait dans la salle :

- Est-ce que ça va ?

- Comme quelqu'un qui s'est stupidement raté...

La jeune voyageuse répondit d'un ton légèrement nerveux. Il semblait évident qu'un brin de colère bouillonnait derrière ses yeux baissés... Colère contre elle-même à ne point douter.

Elle releva un instant les yeux sur ses compagnons, les détaillant tous les deux, avant de piquer quelques coups de fourchette dans son assiette, sans conviction.

*yùna observe aelyn en silence quelques secondes, un regard bienveillant où pointe une touche d'amusement. c'est avec le sourire qu'elle lui passe la main autour des épaules pour la secouer gentiment.

t'en fait pas, va, on a fait ce qu'on a pu! et puis, on était tous à se pisser dessus, t'es la seule qui a osé l'ouvrir.

Osric boit une gorgée de cidre puis fixant Aelyn et lui posant une main amical et chaleureuse sur le bras :

- Comme le dit Yuna, Vu les conditions dans lesquelles cela c'est passé, personne ne peut t'en vouloir pour ce qui est arrivé. Sous l'effet du stress tout le monde peut se tromper, particulièrement face à Ozyr.

Osric sourit puis fait un petit clin d'œil à Aelyn

- C'était très courageux de ta part de te mettre en avant et de parler au nom de la compagnie. D'ailleurs personne d'entre nous n'as accepté d'endosser cette responsabilité. Nous sommes tout aussi fautif que toi.

Il s'interrompt un moment avant de reprendre à voix basse.

- Et puis il y a pire que de se faire bannir d'Oforia.

Osric commence à rire de bon cœur.

*yùna ricane comme une hyène

l'odeur de vieille morue va quand même me manquer...

Ces paroles semble apaiser quelques peut la jeune femme. Elle adresse à ses compagnons une esquisse de sourire.

- Comme si j'avais été la meilleure personne pour m'adresser à elle... Dans son regard, ca se voyait déjà qu'elle savait ce que je pensais d'elle... Par contre... Faudra faire avec ses Historiens maintenant... Comme si on avait pas déjà assez de monde sur le dos...

Elle hausse les épaules en avalant une nouvelle bouchée.

- La prochaine fois... si on va causer à Kroryn, ou Brorne, ou un autre du genre... Retenez moi...

Aelyn esquisse un légère grimace.

- Qu'on vienne plus me parler de la toute grandeur des ailés... Cette histoire me donne à vomir...

ozyr est futée, parano et franchement impressionnante, difficile de lui raconter des conneries.
et pour les historiens...
*yùna soupire
sûr que ça va pas nous faciliter la vie... mais au moins on est en vie.

*elle reste silencieuse un moment, étrangement calme, regarde dehors...
je me demande si l'étoile s'attendait à ce que ça se passe comme ça.
si on est vraiment à 2 doigts de se faire tous dégommer...

Osric reprend son sérieux et regarde les deux jeunes femmes.

- Allons voyons mesdemoiselles, personne ne peut connaitre sa fin avant qu'elle soit arrivée. En attendant il ne faut pas que nous cédions au défaitisme. Il nous reste tant de choses à accomplir encore. Les préparatifs sont en cours mais la croisade n'a pas encore éclaté, il est encore temps de l'arrêter. De plus il semblerait que nous ayons un soutient politique asses important en la personne d'Amila. Bien que je n'apprécie guère sont tempérament force est de reconnaître son efficacité.

Se retournant vers Aelyn et parlant un peu plus bas

- Tu sais on ne peut pas juger tous les dragons en prenant Ozyr comme base. Je suis sûre que tu ne dirais pas la même chose de Nenya par exemple.

*yùna semble chercher ses mots, les sélectionner avec soin...

hum... maintenant que la croisade ne dépend pas plus de nous que de n'importe qui d'autre, j'espère qu'on garde l'idée d'aller voir du côté griff/désert zûl?

Osric se tourne vers Yuna.

- Je ne connais pas les intentions des autres membres du groupe mais pour ma part c'est bien là bas que j'avais l'intention d'aller. Ozyr ayant récupéré sont bien sans avoir eu besoin de débloquer le passage aux navire je penses qu'il faudra bien aller voir par nous même ce qu'il se passe dans le désert. En même temps, même si on avait rempli parfaitement notre mission je me demande si Ozyr aurait vraiment tenu sa part du marché.

Soudain Osric comme à se gratter la barbe d'un air pensif.

- Un monstre marin menaçant les voix marines au sud... La guerre entre les Zûles dans le désert... L'apparition d'une légendaire cité de l'ombre en Pomyrie... Et pendant tout ce temps tout ce à quoi les autres royaumes pensent c'est la guerre contre l'empire Nezora. Griff et la Pomyrie menace de s'éffondrés et personne ne s'en soucie, c'est vraiment étrange comme attitude. On dirait que quelqu'un ou quelquechose fait tout pour que personne ne s'intéresse à la situation de ces deux royaumes.

Se retourne à nouveau vers Yuna.

- Dis moi Yuna où as-tu aperçu E'kan pour la dernière fois ?

e'kan? j'en sais rien. la dernière fois que j'ai essayé de la trouver, je ne l'ai pas vue. c'est très difficile de repérer les étoiles qui ne sont pas alliées...
je sais que la nôtre est vers la pommyrie. que t'lan est dans le désert zûl. t'lac vers offoria aux dernières nouvelles.
mais au vu de ce qui vient de se passer, il est possible qu'il y ait des changements... je vais regarder tout ça avant qu'on parte.

Aelyn lance simplement au mage, dans un soupire.

- Quand je vois ca... Cela me rend encore plus allergique au dévouement dont font preuve certains à leur égard... Ce dévouement aveugle... Je ne vois pas pourquoi les dragons n'auraient pas eux aussi à prouver leur valeur... Assez de s'agenouiller devant eux... Ils ne sont en effet pas tous dans le même panier... mais il faudra qu'ils le prouvent... Comme nous devons sans cesse le faire... il n'y a pas de raison...

*allumant sa pipe, yùna se contente de sourire, un sourire satisfait.

- Je penses qu'il nous est difficile de pouvoir poser un jugement sur des créatures aussi extraordinaires que les dragons. Ils vivent bien plus longtemps que nous et ont par conséquent une expérience et une compréhension du monde bien plus grande que la notre. Je penses que quoi que disent certains, l'humanité n'est pas encore prête à se libérer de la tutelle des dragons. Un jour viendra peut être où nous pourrons nous considérer comme des égaux mais pour l'instant nous ne sommes encore qu'à l'adolescence. Par contre il est peut être vrai que les dragons devraient apprendre à se montrer un peu moins protecteurs avec leurs enfants et les laisser grandir pour passer progressivement à l'âge adulte. Nous avons beaucoup à nous apprendre mutuellement.

*le sourire de yùna s'élargit. elle a l'air de plus en plus de bonne humeur.

tu parles avec modération, ça fait plaisir à voir. je trouve que les dragons nous ressemblent par certains points - nos défauts sont les mêmes. par contre nous n'avons pas du tout les mêmes qualités.
pourquoi donc les dragons et les humains devraient vivre aussi proches? ils n'ont pas besoin l'un de l'autre pour faire ce en quoi ils sont bons, ils peuvent le faire chacun de leur côté sans se manquer l'un l'autre. mais comme ils ont les mêmes défaut, le fait de vivre aussi proches ne peut que les exacerber... non?

*yùna tire sur sa pipe, le regard lumineux, intéressée par ce que le mage pourrait bien penser de ça.

*Osric boit encore une gorgée de cidre et s'accoude à la table apparemment très intéressé par le débat qui va suivre*

Et quelles sont les défauts et les avantages inhérents aux dragons et aux humains selon toi ?

*yùna inspire lentement... essayer de faire clair... aïe...

leurs défauts en général... les mêmes que les humains. on vient d'avoir un bel exemple avec ozyr. ils peuvent être orgueilleux, jaloux, aveuglés, paranoïaques, égoïstes, possessifs, mesquins, colériques, intransigeants... enfin, comme tout le monde, quoi.
et je pense que leurs qualités viennent de ce que tu disais tout à l'heure, et c'est ce en quoi ils se différencient de nous. la compréhension du monde qu'ils ont créé et continuent à faire vivre, principalement. et aussi la sagesse des millénaires, une vision différente de la nôtre... même si ça n'empêche pas certains de se conduire comme des connards...

*Osric a un petit sourire en coin*

Je ne parlais pas forcément de sagesse mais d'expérience. L'expérience s'acquière avec le temps, la sagesse pas forcément. Mais tu ne m'as pas dit qu'elles étaient les qualités que tu prêtais aux humains.

Aelyn écoute d'une oreille la conversation, balladant les restes de son assiette d'un côté et de l'autre de celle-ci.

*yùna réfléchit un instant "pfff... pinailleur..."

hem... les qualités humaines, disons, sont celles qui découlent de la mortalité, du côté très éphémère de leur existence.

*réfléchit un petit moment en faisant tourner le cidre dans sa coupelle* "bah oui je suis pinailleur pour débattre faut bien savoir de quoi on parle"

Et bien je penses que le fait pour les humains de côtoyer les dragons ne risquent plus d'exacerber leurs défaut que de côtoyer d'autres humains. Quand au fait de se côtoyer les dragons pourraient apprendre de la flexibilité et de l'aptitude au changement des humains. Quand à nous je penses que l'on peut apprendre de leurs façon de voir les choses sur le long terme. De plus nous pouvons apprendre de leurs erreurs.

*yùna écoute toujours attentivement, hochant la tête. mais une pointe d'ennui passe quand même dans ses yeux.

oui, sans doute, ce serait vraiment... formidable.
mais les événements ne vont malheureusement pas dans ce sens et, il est possible que je me trompe, l'histoire c'est pas forcément ce que je préfère, mais il me semble que ça a jamais tellement été le cas...

*Prend un ton grave*

- Non, les évènements ne vont pas effectivement pas dans ce sens. Quelques part je suis heureux que les écrits d'Ozyr soit à nouveau entre les mains d'Ozyr car je n'ose même pas imaginer ce qui aurait pu se passer si des fatalistes ou des humaniste l'avait eu. Mais j'espère qu'on va quand même pouvoir sauver les pots cassés avant qu'il y ait trop de morts dans les marches alyzées car connaissant les protecteurs et les guerrier c'est clair qu'ils ne vont pas faire dans la dentelle.

- Bon et puis ce que je viens de dire sur les humains et les dragons faut bien se rendre compte que c'est pas pour tout de suite. Mais j'espère qu'un jour ça puisse se produire.