à l'auberge

et ben...

*yùna n'a vraiment pas l'air convaincue. tant par les arguments que par osric lui-même. elle est un peu déçue par le mage et ses idées... silencieuse une seconde, regarde dehors, fume sa pipe. mais pour une fois elle n'est pas d'humeur à la prise de bec, cette nuit est belle. le sourire éclaire à nouveau son visage, elle revient à son interlocuteur. sa voix semble dépouillée de toute arrière-pensée, empreinte de sincérité.

moi, j'ai envie de changement!

- Yùna n'a pas tord... Personne ne sera jamais capable de dire si oui ou non nous sommes assez sage pour pouvoir voler de nos propres ailes... Moi aussi je pense qu'il faut que cela change... On va attendre combien de temps encore avant de pouvoir prendre nos propres décisions ?

Installé à une table non loin, un homme d'âge mûr semble écouter la discussion avec attention depuis quelques instants. Ses cheveux blonds, tombant en une cascade harmonieuse jusqu'au haut de son dos encadrent un visage viril mais doux. Ses yeux d'un bleu acier fixent avec bienveillance le petit groupe. Il vide alors sa chope de bière d'un trait avant de s'approcher d'Osric d'un pas félin. Un petit air narquois habille les traits harmonieux d'un sourire chaleureux qu'il dédie aux deux jeunes femmes. Il s'adresse alors au mage d'une voix sûre :

- On devine dans vos paroles, une éducation draconiste profondément ancrée. Pourtant il y a, dans ces mêmes paroles, des doutes, fruits selon moi, d'une grande sagesse. Pourtant ceux-ci donneront, à qui sait user de la langue du Neuvième, une main mise sur votre âme. Ma question peut donc se formuler en ces termes :

-il passe alors la main sur son visage, ses traits changeant rapidement jusqu'à adopter ceux d'Osric lui-même. D'une main il écarte un pan de son pancho de cuir fatigué par sa vie de voyages et y glisse son autre main avant d'en ressortir l'exact réplique du Livre d'Ozyr le tendant la seconde suivante au mage tout en poursuivant.-

"Doit on considérer que l'expérience forge la sagesse à tel point que celle-ci devient inéluctablement du fanatisme aveugle mais permet de devenir inébranlable ? Ou que le doute, bien que fondamentalement attaché à Kalimsshar, permet en réalité de discerner les ennemis véritables, même si ceux-ci se cachent sous les traits de personnes que l'on connaît vraiment ?"

Il tend alors un peu plus le livre en direction d'Osric, souriant toujours.

Aelyn ouvre de gros yeux en écoutant et en observant l'inconnu, d'autant plus lorsqu'il sort le livre. Elle attend cependant la réaction de ses deux compagnons, même si une main vient déjà effleurer le fond de la dague de lancer planquée dans son brassard.

*Osric est surpris en voyant soudain devant lui son propre visage puis se reprend. Son regard passe de l'homme au livre. Puis commence à parler sur un ton calme*

- Effectivement, j'ai vu trop de fois la certitude mener au fanatisme et à l'oppression. Le doute offre un contrepoids bien pratique face aux croyances erronées mais c'est une arme à double tranchant. Car celui qui avance trop loin sur la voie du doute fini irrémédiablement par être rongé et détruit par celui-ci. Nul ne peut vivre dans le doute absolu. Nous avons besoins de certitudes pour bâtir et avancer.

*Osric plonge alors son regard dans celui de l'étranger et une flamme semble alors prendre vie au fond de ses yeux. Il continue d'une voix grave et autoritaire.*

Mais qui êtes vous ? Et surtout. *petit silence* Que faites vous avec ceci ? *Osric pointe alors le livre du doigt.*

- Si vos amies symbolisent pour vous la confiance dans ce cas là je suis vos doutes. Cette petite voix qui murmure à votre oreille de se méfier. Celle qui vous affirme que tout n'est qu'apparences trompeuses y compris vos propres certitudes. Si vos amis sont votre famille, je suis indubitablement votre parent. Celui qui vous enseigne à ne pas se fier aux visions fugaces et aux tours de l'esprit, celui qui vous pousse chaque jour à voir l'ennemi véritable où qu'il se cache.

Il tend alors le livre une seconde fois vers Osric.

- Quant à la provenance de ce livre, quelle importance? Ce qui compte c'est que vous l'ayez. N'est-ce pas ? Au même titre que les certitudes qui font de vous quelqu'un de juste et droit.

Une nouvelle fois l'étranger sourit sans détacher son regard du mage.

*Osric prend le livre que l'homme lui tend et commence à l'inspecter magiquement pour déceler la présence du sceau d'Ozyr*

Qu'il est lourd ! Osric se souvenait que la connaissance pesait un certain poids, mais il ne lui semblait pas que ce livre puisse peser autant. Le contact doux sur ses mains de la reliure de cuir devint soudainement très froid. Alors qu'il s'apprêtait à poser sa main droite sur le dessus de la couverture afin d'en explorer magiquement l'origine, une sensation désagréable vint lui chatouiller l'autre main qui soupesait toujours l'ouvrage. Celle d'un corps reptilien glissant entre ses doigts.

Baissant le regard, le mage s'aperçoit alors que ses mains sont recouvertes de serpents et que ce n'est pas le livre qu'il tient à présent mais plusieurs de ces charmants animaux, glissant, sifflant...

Aelyn se recule, les yeux braqués sur les serpents, portant la main à la garde de son épée, retrouvant rapidement son équilibre avant que sa chaise ne l'entraine au sol.

*Osric se redresse soudainement tentant de se débarrasser des serpents se trouvant sur sa toge puis recule de quelques pas, puis fixant l'étranger avec colère.*

- Je n'apprécies guère votre sens de l'humour. Vous feriez bien de ne pas trop jouer avec mes nerfs ou vous pourriez bien finir avec quelques poils roussi.

- Jouer avec vos nerfs ? Voyons Messire Osric, je ne joue nullement. Je suis ce parent qui vous enseigne à vous méfier des faux semblants, à comprendre quel poids représente chacune de vos actions.

Il fixe alors les serpents sur le sol qui rampent vers les quelques clients présents. Les reptiles mordent plusieurs personnes qui s'écroulent au sol, sur les tables... Visages morts, plongés dans les gamelles de nourriture. Femmes, hommes, enfants, tous sans exception sont victimes de leurs attaques. Ceux qui essaient de les tuer s'en montrent clairement incapables. Les serpents glissent, disparaissent, se faufilent. Ils sont pour ainsi dire insaisissables.

- Voyez messire Osric, chaque faiblesse, chaque incertitude conduit à son lot de morts plus encore lorsque cette faiblesse est conduit sur un choix de sagesse, celle la même qui peut être inhérente à la naissance de chacun ou qui s'acquiert à la force de l'expérience.

*yùna reste neutre et observe, prête à réagir si le besoin s'en fait sentir, mais elle sent que ça ne va pas être nécessaire. elle est un peu perdue dans ses pensées. ces fatalistes, ce qu'ils peuvent être sociables! elle a toujours bien aimé ces espèces de dandys des ténèbres qui viennent poser les bonnes questions... ça lui rappelle karshan, il faisait toujours ça avec les gens qu'il rencontrait. c'est parce que les fatalistes ont tendance à s'approprier le concept de doute, alors ils s'amusent à faire douter tout le monde, pour faire gagner du terrain à leur tendance. malgré ses discussions avec khen kar, yùna n'en est toujours pas convaincue... après tout, il est...
alarme: danger, serpents! l'esprit de yùna revient dans l'auberge, remet ses idées en place. pas encore besoin d'elle. elle s'adresse à l'homme au pas félin sur un ton aimable, rompu aux négociations.

-et qu'est-ce qu'on peut faire pour vous?

*Osric sort de ses gonds*

- Crois-tu pouvoir ébranler mon esprit avec tes belles paroles et tes petits tour de passe passe ? Tu vas goûter aux flammes de Kroryn pour ce que tu viens de faire. *En regardant les clients morts*

*Osric se rapproche d'un pas résolu vers l'étranger*

*yùna continue d'observer le blondinet. s'il a une raison de faire ça, on va le savoir tout bientôt.
pensant par habitude au coup de la diversion, elle regarde autours, dehors, élargit son champ d'attention.

L'homme sourit au mage...

- Le choix se pose alors maintenant. Vous pouvez décider de laisser faire, observant l'inéluctabilité d'un combat qui vous dépasse totalement et compter vos morts à la fin de celui-ci. Vous pouvez décider d'abattre celui qui a provoqué cela en espérant que sa mort arrête cette folie ou vous pouvez rééquilibrer les forces en présence afin que chacun ait une chance de s'en sortir. Mais pour cela, il faut bien souvent que la personne ayant amorcé la guerre vous donne la façon de l'arrêter.

Maintenant au contact d'Osric, l'étranger le regarde avec un petit sourire tandis que, dans son dos, les serpents continuent leur oeuvre.

- Eh bien tentons ! Yuna ! Aelyn ! Occupez vous des serpents.

*Osric tente d'asséner un coup de poing de toute sa force pour assommer l'étranger*

L'étranger fait un simple pas de côté pour éviter le coup d'Osric et continue ses explications.

- Pour affronter une puissance comme celle que vous préparer à rencontrer, une attaque de front ne vous réussira guère, je le crains. Ne soyez pas trop prévisible Messire Osric, cela vous jouera des tours... Il faut savoir courber l'échine de temps à autre pour paraître insignifiant. La toute puissance que vous avez invoquée ne résoud pas les problèmes. Elle donne l'exact mesure de votre ferveur, rien de plus.

*Osric semble se résigner*

Que faut-il que je fasses pour que vous cessiez ce carnage ? Qu'attendez-vous de moi ?

Aelyn se contente d'observer la scène et ne bouge pas, fixant l'inconnu avec un regard suspicieux, mais sur la garde de sa lame.

L'étranger s'approche d'un des serpents, se ramassant sur lui même pour le surprendre de dos. Il saisi prestement un reptile au bas du crâne et le montre à Osric.

- Voilà comment il faut procéder. Maintenant que je vous l'ai enseigné, transmettez ce savoir pour que les gens puissent se défendre...

Il fixe un instant le mage et ajoute :

- Mais je dois vous confesser quelque chose. Vous avez fait mention de tour de passe passe. Et en effet, tout ceci n'est que de la poudre jetée aux yeux crédules. Regardez plutôt...

Dans la salle règne le calme. Les clients sont assis, mangent tout en bavassant, inconscients du drame qui vient de se jouer pour Osric et ses compagnons. L'illusion était intense, parfaite mais seul le groupe semble en avoir été victime.

Il se tourne alors vers Yuna...

- Vous pouvez effectivement faire quelque chose pour moi mais la question réelle est : Qu'est-ce que je peux faire pour vous ? Où comptez-vous vous rendre à présent ?

Aelyn toise l'homme un instant.

- En quoi cela vous concerne-t-il ? Certes... Votre petite illusion était convaincante, mais pourquoi irait-on nous fier à un inconnu ? Qui êtes-vous d'ailleurs ?

Elle garde cependant toujours sa main sur la garde de sa lame, doigts détendus.

- Et bien je pourrais vous retourner la question, mais je pense que cela ne nous avancerait guère plus. Je suis une des rares personnes qui se range de votre côté. Quelqu'un qui voit d'un aussi mauvais oeil que vous cette croisade qui se prépare. Car elle aura bien lieu, plus violente qu'à son origine. Je suis un rêveur éveillé qui observe les Grands de ce monde, leurs complots, leurs passions et leurs peurs. Pourquoi devriez-vous me faire confiance ? Car en ces heures troubles les alliés se font rares et à défaut de vous venir physiquement en aide, je puis vous être utile d'autres manières.

L'homme contemple alors Aelyn de haut en bas avant de lui adresser un sourire charmant.

*Osric reprend ses esprits et fixe à nouveau l'étranger*

Et de quelle sorte d'aide pourriez-vous nous gratifier ? Et en quoi cette croisade est mauvaise pour vous ?

L'homme semble visiblement ravi d'avoir réussi à capter l'attention du groupe.

- Des informations, des méthode, des secrets ou simplement des contacts ici est là. Mais pour cela il me faut savoir où vous comptez vous rendre. En quoi cette croisade est mauvaise pour moi ? Vous devriez dire : "En quoi cette croisade sera-t-elle bonne pour quiconque ?" Les humanistes en souffriront, les fatalistes également... Mais à plus longue échelle même les draconistes. Savez-vous ce qu'il se passe lorsqu'un pouvoir devient totalitaire ? Il s'auto-détruit, purement et simplement. Kor n'est pas encore prêt à vivre sous le joug d'une seule puissance, aussi bien intentionnée soit-elle. Nous devons encore grandir, comprendre pourquoi nous sommes ici et trouver la place qui nous a été attribuée. Rares sont ceux qui y sont déjà parvenus et cette Croisade ne fera que provoquer l'effondrement d'une civilisation qui atteint son apogée.

Sans rien ajouter l'homme reprend place à sa table, invitant en silence le groupe à le rejoindre.

*L'attitude se fait soudain moins agressive vis à vis de l'étranger suite à son discours. Il s'approche de la table et s'assied.*